Avec des parts de marché respectives de 27,5%, 22,4% et 22,3% en 2012, Colruyt, Carrefour (+ Mestdagh), et Delhaize [1] dominent le secteur de la grande distribution en Belgique. Près de deux tiers des achats réalisés en grande surface le sont dans des magasins de ces trois enseignes.
C’est donc une concurrence féroce qui fait rage entre les trois distributeurs. Une rengaine que les salariés de Delhaize et Carrefour, victimes de restructurations ces dernières années, connaissent très bien.
En 2010, c’est Carrefour, prétextant des pertes et une baisse des parts de marché de sa filiale belge (et ne l’oublions pas, l’entrée au capital du Groupe Arnault et du fonds d’investissement Colony Capital moins de trois ans avant) qui annonçait un plan de licenciement qui allait concerner un peu plus de 1.000 salariés.
En juin 2014, c’est au tour de Delhaize d’annoncer un plan de restructuration, poliment nommé « plan de transformation ». 1.800 salariés seront concernés (départs volontaires, prépension) et 9 magasins passeront alors sous franchise tandis qu’un autre sera définitivement fermé.
Dans les deux cas, la perte de parts de marché, des profits insuffisants et la concurrence des discounters - dont Colruyt - seront évoqués. Pourtant, la concurrence ne serait peut-être pas aussi féroce que ce que nous disent les distributeurs.
C’est Bloomberg qui nous dévoile l’information [2] : les « trois concurrents », ainsi que 14 autres entreprises qui se seraient entendues sur une hausse coordonnée des prix de certains produits (droguerie, parfumerie, hygiène) sont sous le coup d’une procédure menée par l’Autorité belge de la concurrence [3]. Les grands distributeurs seraient à l’origine de cette entente qui se serait faite avec l’aide des fournisseurs.
Des perquisitions avaient déjà eu lieu en 2007 chez les trois distributeurs pour cette même affaire [4]. En 2012, un rapport a été remis aux entreprises concernées pour leur notifier les faits reprochés. En réaction, Colruyt avait assigné en justice l’autorité de la concurrence pour faire appel de ce rapport. Delhaize et Carrefour avaient fait de même peu après, dans le courant 2013.
L’amende pourrait être salée pour les distributeurs, jusqu’à 10% de leur chiffre d’affaires. En décembre 2014 en France, L’Oréal, Gillette, Procter & Gamble et dix autres entreprises ont été condamnées à 950 millions d’euros d’amende pour des faits similaires : une entente sur les prix de produits d’entretien, d’hygiène et de cosmétique [5].
Selon le journal financier, la sanction prononcée pourrait atteindre des records pour la Belgique. Colgate, qui a dénoncé ses petits camarades le premier pourrait voir sa sanction allégée. Les entreprises concernées n’ont pas souhaité répondre au journal américain qui annonce que la sanction pourrait être rendue publique dans le courant du mois de juin.
[1] Marketing Map - L’Echo, 26 juin 2012
[3] Parmi les distributeurs, Cora, Intermarché et Makro sont également concernés. Du côté des fournisseurs, Beiersdorf, Bolton Belgium, Colgate, Georgia Pacific, GSK Consumer Healthcare, Henkel, Loreal, P&G, Reckitt Benckiser, Sara Lee et Unilever sont impliqués.