Même si l’affaire a fait peu de bruit dans la presse belge, le jugement rendu le 8 septembre 2008 par le tribunal du travail de Libourne (en Gironde, près de Bordeaux) fera date. Arena est un fabricant de maillots de bain, à l’origine créé par Adidas et propriété depuis 2001 du fonds d’investissement italien BS Private Equity, dont les activités sont largement délocalisées en Tunisie. Chiffre d’affaires 2007 : 80 millions d’euros. La coupe est pleine, et déborde, cependant, lorsque Arena décide de fermer son usine de Libourne, le 31 mars 2007, en mettant à la porte 161 ouvrières, la plupart âgées de plus de 50 ans, pour sous-traiter la production en Chine. Les travailleuses porteront l’affaire devant le tribunal du travail (les prud’hommes). Il ne sera pas impressionné par les arguments de la direction, qui fera valoir que les coûts de production, de 40% plus élevés en France, justifiaient la fermeture. En effet, le tribunal estimera que le licenciement des ouvrières est "le résultat d’une opération purement financière", qu’il leur cause "un préjudice d’une exceptionnelle gravité" (en avril 2008, seules 42 ouvrières avaient retrouvé un contrat définitif ou supérieur à 6 mois) et que la décision de fermer l’usine, contrairement à ce qu’affirmait la direction, ne visait pas "à rétablir les marges, mais à les augmenter". C’est appeler un chat, un chat. Arena a été condamné à verser 4,8 millions d’euros de dommages et intérêts aux travailleuses pour licenciement économique abusif. Ce n’est encore qu’un pis-aller, l’usine restera fermée, mais la décision a valeur de signal, d’un changement dans la perception publique des délocalisations.
[Source : : Solidaire, 18 septembre 2008, L’Humanité du 9 septembre 2008 et l’Usine Nouvelle du 17 novembre 2006.